Actualité de la recherche en genre et sexualité | Maroussia Ferry – 12/02/2024

Maroussia Ferry est invitée dans le cadre du séminaire Actualité de la recherche en genre et en sexualité de l’EUR GSST pour la séance du 12 février 2024 de 12h30 à 14h30.

Maroussia Ferry est anthropologue et maîtresse de conférences à l’ENS. Spécialiste des migrations des femmes géorgiennes, et de la recomposition des relations de genre et des économies morales dans un monde en crise, elle poursuit ses recherches en anthropologie de la valeur et des dynamiques sociales post-effondrement dans les pays du Caucase.

Elle viendra présenter sa thèse Ce que nous aurions perdu : anthropologie de la crise en Géorgie postsoviétique (1991-2015).

Ce séminaire a lieu tous les deuxièmes et quatrièmes lundis du mois, de 12h30 à 14h30 à l’auditorium de la MSH, 20 avenue George-Sand 93210 Saint-Denis, et en hybride.

Pour vous inscrire au séminaire, rendez-vous sur Neobab. Les inscriptions doivent être faites 72h avant une séance pour recevoir le lien de connexion. Le programme complet des séances est disponible ici.

Résumé de la thèse

Cette recherche porte sur les recompositions des économies morales en Géorgie liées à la crise économique et politique profonde qu’a traversée et traverse encore ce nouvel État. À la chute de l’Union Soviétique, l’économie de la Géorgie s’est effondrée brutalement tandis que ses institutions étatiques s’affaiblissaient drastiquement et qu’éclataient sur son territoire deux guerres séparatistes et une guerre civile. Les sociabilités, notamment familiales et amicales, en ont été bouleversées. Dans ce travail, Maroussia Ferry analyse les crises structurelles et les recompositions de ces liens sociaux, sur la base d’une enquête ethnographique de trois ans auprès d’une population urbaine déclassée et précarisée. Celle-ci est encline aux migrations de travail, fortement féminisées en Géorgie, et touchée par de nombreux surendettements.

Ces deux phénomènes, qui touchent aux temporalités biographiques et aux prises de risques, s’articulent à un sentiment plus large de rupture et de perte historique dont la mémoire est retravaillée pour tenter de faire lien à nouveau. L’articulation entre ces différentes figures de la crise a entraîné une reconfiguration de la confiance et des pratiques de dons réciproques, dans un contexte de rupture avec les normes de genre qui se cristallise notamment autour de la migration féminine et de la défaillance du rôle masculin comme pourvoyeur économique de la famille. Ces recompositions entraînent un resserrement des solidarités familiales sur le lien filial maternel qui, par son asymétrie et parfois par son immoralité-même, fait jouer pleinement les réinterprétations compensatoires des ethos de genre telles que la valorisation d’un certain tragique masculin et celle du don sacrificiel féminin. Les obligations morales et économiques inhérentes à ce lien permettent plus largement aux sociabilités d’être revisitées afin de composer avec la crise postsoviétique géorgienne.